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ment à ces pingouins. Ils tournaient vers lui, avec une curiosité amie, leur petit œil rond prolongé en avant par une tache blanche ovale, qui donnait à leur regard quelque chose de bizarre et d’humain.

Touché de leur recueillement, le saint homme leur enseignait l’Évangile.

— Habitants de cette île, le jour terrestre qui vient de se lever sur vos rochers est l’image du jour spirituel qui se lève dans vos âmes. Car je vous apporte la lumière intérieure ; je vous apporte la lumière et la chaleur de l’âme. De même que le soleil fait fondre les glaces de vos montagnes, Jésus-Christ fera fondre les glaces de vos cœurs.

Ainsi parla le vieillard. Comme partout dans la nature la voix appelle la voix, comme tout ce qui respire à la lumière du jour aime les chants alternés, les pingouins répondirent au vieillard par les sons de leur gosier. Et leur voix se faisait douce, car ils étaient dans la saison de l’amour.

Et le saint homme, persuadé qu’ils appartenaient à quelque peuplade idolâtre et faisaient en leur langage adhésion à la foi chrétienne, les invita à recevoir le baptême.

— Je pense, leur dit-il, que vous vous baignez souvent. Car tous les creux de ces roches sont pleins d’une eau pure, et j’ai vu tantôt, en me rendant à votre assemblée, plusieurs d’entre vous