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passait pour trop avancé ; soutenant des projets reconnus dangereux pour le capital, il avait contre lui les grandes compagnies financières et, par conséquent, les journaux de toutes les opinions. Voyant le danger grossir, le cabinet abandonna ses projets, son programme, ses opinions, mais trop tard : un nouveau gouvernement était prêt ; sur une question insidieuse de Paul Visire, aussitôt transformée en interpellation, et un très beau discours d’Hippolyte Cérès, il tomba.

Le président de la république choisit pour former un nouveau cabinet ce même Paul Visire, qui, très jeune encore, avait été deux fois ministre, homme charmant, habitué du foyer de la danse et des coulisses des théâtres, très artiste, très mondain, spirituel, d’une intelligence et d’une activité merveilleuses. Paul Visire, ayant constitué un ministère destiné à marquer un temps d’arrêt et à rassurer l’opinion alarmée, Hippolyte Cérès fut appelé à en faire partie.

Les nouveaux ministres, appartenant à tous les groupes de la majorité, représentaient les opinions les plus diverses et les plus opposées, mais ils étaient tous modérés et résolument conservateurs[1] On garda le ministre des affaires

  1. Ce ministère ayant exercé une action considérable sur les destinées du pays et du monde, nous croyons devoir en donner la composition : intérieur et présidence du Conseil, Paul Visire ; justice, Pierre Bouc ; affaires étrangères, Victor Crombile ; finances, Terrasson ; instruction publique, Labillette ; commerce,