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par corps d’armée, les villes, les districts, les provinces, apportèrent leur adhésion.

Environ ce temps, le ministre de la guerre, se rendant auprès de son chef d’état-major, vit avec surprise que la vaste pièce où travaillait le général Panther, naguère encore toute nue, portait maintenant sur chaque face, depuis le plancher jusqu’au plafond, en de profonds casiers, un triple et quadruple rang de dossiers de tout format et de toutes couleurs, archives soudaines et monstrueuses, ayant atteint en quelques jours la croissance des chartriers séculaires.

— Qu’est-ce que cela ? demanda le ministre étonné.

— Des preuves contre Pyrot, répondit avec une patriotique satisfaction le général Panther. Nous n’en possédions pas quand nous l’avons condamné : nous nous sommes bien rattrapés depuis.

La porte était ouverte ; Greatauk vit déboucher du palier une longue file de portefaix, qui venaient décharger dans la salle leurs crochets lourds de papiers, et il aperçut l’ascenseur qui s’élevait en gémissant, ralenti par le poids des dossiers.

— Qu’est-ce que cela encore ? fit-il.

— Ce sont de nouvelles preuves contre Pyrot, qui nous arrivent, dit Panther. J’en ai demandé dans tous les cantons de Pingouinie, dans tous