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Le général Panther alla aussitôt informer le ministre de la guerre de l’issue du procès.

— Par bonheur, dit-il, les juges avaient une certitude, car il n’y avait pas de preuves.

— Des preuves, murmura Greatauk, des preuves, qu’est-ce que cela prouve ? Il n’y a qu’une preuve certaine, irréfragable : les aveux du coupable. Pyrot a-t-il avoué ?

— Non, mon général.

— Il avouera : il le doit. Panther, il faut l’y résoudre ; dites-lui que c’est son intérêt. Promettez-lui que, s’il avoue, il obtiendra des faveurs, une réduction de peine, sa grâce ; promettez-lui que, s’il avoue, on reconnaîtra son innocence ; on le décorera. Faites appel à ses bons sentiments. Qu’il avoue par patriotisme, pour le drapeau, par ordre, par respect de la hiérarchie, sur commandement spécial du ministre de la guerre, militairement… Mais dites-moi, Panther, est-ce qu’il n’a pas déjà avoué ? Il y a des aveux tacites ; le silence est un aveu.

— Mais, mon général, il ne se tait pas ; il crie comme un putois qu’il est innocent.

— Panther, les aveux d’un coupable résultent parfois de la véhémence de ses dénégations. Nier désespérément c’est avouer. Pyrot a avoué ; il nous faut des témoins de ses aveux, la justice l’exige.

Il y avait dans la Pingouinie occidentale un port