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mer. En un tournemain je vous débarrasserais de cet animal… Mais en ce moment, j’ai d’autres chiens à fouetter… Je me suis flanqué une forte culotte au bec. Il faut que je trouve une grosse somme. L’honneur avant tout, que diable !…

Le ministre et le subémiral se regardèrent un moment en silence. Puis Barbotan dit avec autorité :

— Subémiral Volcanmoule, débarrassez-nous d’un soldat séditieux. Vous rendrez un grand service à la Pingouinie et le ministre des affaires internes vous assurera les moyens de payer vos dettes de jeu.

Le soir même, Volcanmoule se présenta devant Chatillon et le contempla longtemps avec une expression de douleur et de mystère.

— Pourquoi fais-tu cette tête-là ? demanda l’émiral inquiet.

Alors Volcanmoule lui dit avec une mâle tristesse :

— Mon vieux frère d’armes, tout est découvert. Depuis une demi-heure, le gouvernement sait tout.

À ces mots, Chatillon atterré s’écroula.

Volcanmoule poursuivit :

— Tu peux être arrêté d’un moment à l’autre. Je te conseille de ficher le camp.

Et, tirant sa montre :

— Pas une minute à perdre.