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amycus et célestin

Il était à demi vêtu d’une peau de bête, et c’était plutôt un faune qu’un garçon ; son regard était perçant, son nez camus, sa face riante. Ses cheveux bouclés cachaient les deux petites cornes de son front têtu ; ses lèvres découvraient des dents aiguës et blanches ; des poils blonds descendaient en deux pointes de son menton. Un duvet d’or brillait sur sa poitrine. Il était agile et svelte ; ses pieds fourchus se dissimulaient dans l’herbe.

Célestin, qui possédait toutes les connaissances que donne la méditation, vit aussitôt à qui il avait affaire, et il leva le bras pour décrire le signe de la croix. Mais le faune, lui saisissant la main, l’empêcha d’achever ce geste puissant.

— Bon ermite, lui dit-il, ne m’exorcise pas. Ce jour est pour moi comme pour toi un jour de fête. Il ne serait pas charitable de me contrister dans le temps pascal. Si tu veux, nous cheminerons ensemble et tu verras que je ne suis pas méchant.

Célestin était, par bonheur, très versé dans les sciences sacrées. Il lui souvint à propos que saint Jérôme avait eu pour compagnons de