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anecdote de floréal, an ii

— Citoyenne, lui dit la jolie fille, demain soir un homme qui t’aime t’attendra sur l’avenue de l’Observatoire avec une voiture. Prends ce paquet, il contient des vêtements pareils à ceux que je porte ; tu t’en revêtiras, dans ta chambre, pendant le souper. Tu es de ma taille et blonde comme moi. On peut, dans l’ombre, nous prendre l’une pour l’autre. Un gardien, qui est mon amoureux et que nous avons mis dans le complot, montera dans ta chambre et t’apportera le panier avec lequel je vais aux provisions.

» Tu descendras avec lui par l’escalier dont il a la clef et qui conduit à la loge de mon père. De ce côté, la porte n’est ni fermée ni gardée. Il faut seulement éviter que mon père ne te voie. Mon amoureux se mettra le dos contre le carreau de la loge, et il te parlera comme à moi. Il te dira : « Au revoir, citoyenne Rose, et ne soyez plus si méchante. » Tu t’en iras tranquillement dans la rue. Pendant ce temps, je sortirai par le guichet principal et nous nous rejoindrons toutes deux dans le fiacre qui doit nous emmener.

Fanny buvait, avec ces paroles, les souffles