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l’étui de nacre

— Je sais que tu n’es pas insensible, citoyen Lardillon ; je te prie de me réunir à celle que j’aime et de m’envoyer immédiatement à Port-Libre.

— Eh ! eh ! dit Lardillon avec un sourire sur ses lèvres à la fois fines et fortes, c’est plus que la vie, c’est le bonheur que tu me demandes, citoyen.

Il allongea le bras du côté de la chambre à coucher et cria :

— Épicharis ! Épicharis !

Une grande femme brune apparut, les bras et la gorge nus, en chemise et en jupon, une cocarde dans les cheveux.

— Ma nymphe, lui dit Lardillon en l’attirant sur ses genoux, contemple le visage de ce citoyen et ne l’oublie jamais ! Comme nous, Épicharis, il est sensible ; comme nous, il sait que la séparation est le plus grand des maux. Il veut aller en prison et à la guillotine avec sa maîtresse. Épicharis, peut-on lui refuser ce bienfait ?

— Non, répondit la fille en tapotant les joues du moine en carmagnole.

— Tu l’as dit, ma déesse, nous servirons deux