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regarda dans une glace si sa toilette était en ordre et s’il avait le teint bon, et s’en alla d’un pas léger, par delà le fleuve, jusqu’à la maison basse qui fait le coin des rues de Seine et Mazarine. C’est là que logeait le citoyen Lardillon, substitut de l’accusateur public au tribunal révolutionnaire, homme serviable, qu’André avait connu capucin à Angers et sans-culotte à Paris.

Il sonna. Après quelques minutes de silence, une figure parut à travers un judas grillé et le citoyen Lardillon, s’étant assuré prudemment de la mine et du nom du visiteur, ouvrit enfin la porte du logis. Il avait la face pleine, le teint fleuri, l’œil brillant, la bouche humide et l’oreille rouge. Son apparence était d’un homme jovial, mais craintif. Il conduisit André dans la première pièce de son appartement.

Une petite table ronde, de deux couverts, y était servie. On y voyait un poulet, un pâté, un jambon, une terrine de foie gras et des viandes froides couvertes de gelée. À terre, trois bouteilles rafraîchissaient dans un seau. Un ananas, des fromages et des confitures cou-