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mémoires d’un volontaire

répandu depuis deux siècles ses trésors sur les rives illustres de la Seine. Je ne connaissais encore que des châteaux et des églises gothiques dont la mélancolie, empreinte de rudesse, inspire seulement à l’âme des pensées disgracieuses. Paris, il est vrai, possède encore quelques-uns de ces édifices barbares. La cathédrale même, qui s’élève dans la Cité, témoigne, par l’irrégularité et la confusion de sa structure, de l’ignorance des âges où elle fut construite. Les Parisiens pardonnent à sa laideur en raison de son antiquité. Le Père Féval avait coutume de dire que toutes les antiquités sont vénérables.

Mais quel spectacle différent offrent les monuments des siècles polis ! La régularité du plan, l’exacte proportion des parties, la large ordonnance de l’ensemble, enfin la beauté des ordres imités de l’antique, voilà les qualités qui brillent dans les ouvrages des modernes architectes. Elles se réunissent toutes pour faire de la colonnade du Louvre un chef-d’œuvre digne de la France et de ses rois. Quelle ville que Paris ! M. Mille m’a montré le théâtre où les plus belles actrices du monde prêtent leur