qu’une pareille bouche n’était pas faite pour prononcer ce nom de Lavinie, que j’aimais encore plus que celui de Rose. Car, il faut que je le confesse, l’idyllique et royale fiancée du malheureux Turnus était parée dans mon imagination de grâces augustes. Son image idéale me cachait la beauté plus vulgaire de la fille du maréchal. M. Joursanvault, tel était le nom de mon professeur de quatrième, ne me plaisait guère ; mes condisciples me faisaient peur : ils m’avaient l’air terriblement hardis et je craignais, avec raison, que ma naïveté ne leur parût ridicule. J’avais grande envie de pleurer.
Le respect humain, plus fort que ma douleur, retint seul mes larmes.
Le soir étant venu, je sortis du collège et m’en allai chercher dans la ville le gîte que m’avait retenu mon père. Je logeais, avec cinq autres écoliers, chez un artisan, dont la femme nous faisait la cuisine. Nous lui donnions chacun vingt-cinq sous chaque mois.
Mes condisciples essayèrent d’abord de me railler, sur mes habits mal faits et mon air rustique. Mais ils cessèrent leurs plaisanteries, quand ils virent qu’elles ne me fâchaient pas.