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gestas

chaux, ce paradis peint dont elle croyait entendre les harpes, et cet enfer où les damnés sont « bouillus », ce qui faisait grand’peur à la bonne créature. Gestas entra dans la maison de Dieu. Il n’y vit personne, pas même un donneur d’eau bénite, pas même une pauvre femme comme la mère de François Villon. Formée en bon ordre dans la nef, l’assemblée des chaises attestait seule la fidélité des paroissiens et semblait continuer la prière en commun.

Dans l’ombre humide et fraîche qui tombait des voûtes, Gestas tourna sur sa droite vers le bas-côté où, près du porche, devant la statue de la Vierge, un if de fer dressait ses dents aiguës, sur lesquelles aucun cierge votif ne brûlait encore. Là, contemplant l’image blanche, bleue et rose, qui souriait au milieu des petits cœurs d’or et d’argent suspendus en offrande, il inclina sa vieille jambe raidie, pleura les larmes de saint Pierre et soupira des paroles très douces qui ne se suivaient pas. « Bonne Vierge, ma mère, Marie, Marie, votre enfant, votre enfant, maman ! » Mais très vite, il se releva, fit quelques pas rapides et s’arrêta