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l’étui de nacre

tout ouverte, Lamia vit, étendu sur les coussins, un vieillard d’une vaste corpulence qui, le front dans la main, regardait d’un œil sombre et fier. Son nez aquilin descendait sur ses lèvres, que pressaient un menton proéminent et des mâchoires puissantes.

Tout d’abord, Lamia fut certain de connaître ce visage. Il hésita un moment à le nommer. Puis soudain, s’élançant vers la litière dans un mouvement de surprise et de joie :

— Pontius Pilatus ! s’écria-t-il, grâces aux dieux, il m’est donné de te revoir !

Le vieillard, faisant signe aux esclaves d’arrêter, fixa un regard attentif sur l’homme qui le saluait.

— Pontius, mon cher hôte, reprit celui-ci, vingt années ont assez blanchi mes cheveux et creusé mes joues pour que tu ne reconnaisses plus ton Ælius Lamia.

À ce nom, Pontius Pilatus descendit de litière aussi vivement que le permettaient la fatigue de son âge et la gravité de son allure. Et il embrassa deux fois Ælius Lamia.

— Certes, il m’est doux de te revoir, dit-il. Hélas ! tu me rappelles les jours anciens, alors