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la messe des ombres

mit un louis qui ne sonna pas plus que les autres pièces d’or ou d’argent.

Puis le vieux chanoine s’arrêta devant Catherine Fontaine, qui fouilla dans sa poche sans y trouver un liard. Alors, ne voulant refuser son offrande, elle détacha de son doigt l’anneau que le chevalier lui avait donné la veille de sa mort, et le jeta dans le bassin de cuivre. L’anneau d’or, en tombant, sonna comme un lourd battant de cloche et, au bruit retentissant qu’il fit, le chevalier, le chanoine, le célébrant, les clercs, les dames, les cavaliers, l’assistance entière s’évanouit ; les cierges s’éteignirent et Catherine Fontaine demeura seule dans les ténèbres.


Ayant achevé de la sorte son récit, le sacristain but un grand coup de vin, resta un moment songeur et puis reprit en ces termes :

— Je vous ai conté cette histoire telle que mon père me l’a contée maintes fois, et je crois qu’elle est véritable parce qu’elle est conforme à tout ce que j’ai observé des mœurs et des coutumes particulières aux trépassés. J’ai beaucoup pratiqué les morts depuis mon