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la messe des ombres

et qu’il en sortait une grande clarté de cierges. Elle continua de marcher et, ayant franchi le porche, elle se trouva dans une assemblée nombreuse qui emplissait l’église. Mais elle ne reconnaissait aucun des assistants, et elle était surprise de voir tous ces gens vêtus de velours et de brocart, avec des plumes au chapeau et portant l’épée à la mode des anciens temps. Il y avait là des seigneurs qui tenaient de hautes cannes à pommes d’or et des dames avec une coiffe de dentelle attachée par un peigne en diadème. Des chevaliers de Saint-Louis donnaient la main à ces dames qui cachaient sous l’éventail un visage peint, dont on ne voyait que la tempe poudrée et une mouche au coin de l’œil ! Et tous, ils allaient se ranger à leur place sans aucun bruit, et l’on n’entendait, tandis qu’ils marchaient, ni le son des pas sur les dalles ni le frôlement des étoffes. Les bas-côtés s’emplissaient d’une foule de jeunes artisans, en veste brune, culotte de basin et bas bleus, qui tenaient par la taille des jeunes filles très jolies, roses, les yeux baissés. Et, près des bénitiers, des paysannes en jupe rouge, le corsage lacé, s’asseyaient par