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ment avec les congrégations qu’on affectait de frapper au grand jour. Ils faisaient profession d’anticléricalisme, et si ce mot impliquait pour eux, ainsi qu’il semble, l’obligation d’assurer la souveraineté de l’État laïque, connaissaient-ils si mal l’Église romaine qu’ils pussent croire la contenir sans effort dans le domaine spirituel comme si elle ne revendiquait pas perpétuellement la souveraineté sur les mœurs, c’est-à-dire la souveraineté temporelle ? Ils croyaient la tenir par le contrat de 1801, sans s’apercevoir que ce contrat réglait uniquement les rapports du Pape et de l’État français avec l’Église gallicane et qu’il n’y avait plus d’Église gallicane. Ils gardaient à l’œuvre législative du consul une confiance inébranlable et qui les trompait toujours. On souffrait de les voir interpréter le Concordat avec quelque étroitesse d’esprit, le prendre quelquefois par ses côtés les plus bas, et croire qu’on vient à bout par des moyens de police d’une institution qui, pendant tant de siècles, mania, pétrit, broya la multitude humaine et qui garde, jusqu’en sa décrépitude, les restes d’une force qui courba les empereurs. Qu’avaient-ils fait depuis qu’ils étaient au pouvoir, qu’avaient-ils tenté pour réduire cet adversaire que leurs ancêtres, en 1826, appelaient le « parti prêtre » et qu’ils n’osaient pas nommer ? Ils avaient réduit le traitement des évêques, supprimé les bourses des séminaires, retranché quelques vicariats et quelques aumôneries, enfin, d’année en année, diminué le budget des Cultes de six à sept millions. Ils avaient irrité l’ennemie sans l’affaiblir.