Page:Anatole France - L’Église et la République.djvu/25

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le jésuite Gerhard Schneemann expose dans la Civilta Catolica, organe de son ordre, qu’il est convenable et nécessaire à l’Église de réduire les insoumis par le moyen des châtiments sensibles, tels qu’amendes, jeûnes, chartre privée, flagellation. « Si l’Église, comme il est vrai, possède, dit-il, une juridiction extérieure, il lui appartient d’infliger des peines temporelles ». Et ce Père démontre que non seulement elle le peut, mais encore qu’elle le doit. « En effet, l’amour des choses terrestres, qui offense l’ordre établi par elle, n’est pas efficacement contenu et réprimé par des peines purement spirituelles et par la privation des biens de l’âme, les châtiments de cette nature se trouvant être précisément les moins efficaces sur les plus grands coupables, d’où il suit que, si l’ordre doit être rétabli partout où il a été rompu, si celui qui se complut dans le péché doit expier et souffrir, il est de toute nécessité que l’épouse de Jésus-Christ lui applique des peines temporelles et sensibles ».

Sans ce pouvoir coercitif extérieur, l’Église, à l’estimation du Père Schneemann, n’atteindrait pas la fin du monde. Quant aux limites de sa juridiction, elle seule a le droit de les déterminer et quiconque lui conteste ce droit est en rébellion contre Dieu. Le père Schneemann observe, non sans douleur, que le monde moderne n’a pas l’intelligence de ces vérités salutaires et qu’il est démesurément loin d’y conformer sa conduite. « Nous voyons, dit-il, que l’État n’accomplit pas toujours son devoir envers l’Église