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avait quelquefois et l’adjura d’écouter ce qu’il lui restait à dire :

— Si je viens à mourir et si vous vous souvenez de moi, cherchez, ma chère Hélène, cherchez Samuel Ewart, et exécutez en sa faveur mes dernières volontés. Au nom de Notre Seigneur Jésus-Christ, qui viendra ressusciter les morts, je vous adjure de ne rien négliger pour faire parvenir au dernier descendant de David Ewart la somme que je lui destine. Il vit ; il y a des nuits où je le vois. Je le reconnaîtrais, s’il venait. Il viendra.

Alors le malade regarda fixement une portière sombre qui pendait à grands plis, allongea son bras qui tremblait, et s’écria :

— Là, là, devant cette porte, c’est lui, c’est Sam Ewart ! Vous voyez bien cette marque qu’il porte au cou, sous sa chemise de matelot ; c’est une marque rouge, à cause de son arrière-grand-père, le vieux David… Sam ! Sam ! Oh ! mon Dieu !

Il retomba sur sa chaise longue et s’assoupit lourdement. Hélène ne savait que faire et se perdait dans les fioles. Elle sonna Groult, qui l’écarta assez rudement et s’empara du malade.