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sur lesquels il griffonnait ses comptes. Son grimoire, ses affreuses pattes, son déhanchement, l’odeur de pharmacie dont il était imprégné, les taches que les oxydes laissaient sur sa peau, le rendaient effroyable aux femmes de chambre et aux cuisinières, qui le nommaient Clochon, avaient peur de lui comme du diable, le jugeaient capable de tout et finalement ne trouvaient rien à lui reprocher. Groult était impeccable.

Hélène, à qui il inspirait une répugnance instinctive, essaya de l’écarter ; mais elle reconnut bientôt qu’il était indispensable et se résigna à le voir clochant sans cesse entre elle et son mari. Il ne parut pas lui garder rancune et ne se départit pas un seul moment envers elle de ses façons de parfait domestique.

La malveillance de madame ne l’avait pas effrayé outre mesure. Il possédait la confiance de son maître et savait que monsieur ne se séparerait pas facilement de lui. Il y avait un lien entre M. Haviland et son domestique Groult. Depuis vingt ans ils cherchaient ensemble Samuel Ewart.


M. Haviland était encore un enfant quand il en-