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mel au guichet des billets, l’entendit demander deux billets pour Avranches, prit après elle un billet pour Avranches et respira. Il était quatre heures douze minutes, et le train partait à quatre heures trente-cinq. Madame Lourmel alla avec sa fille faire enregistrer ses bagages. Remi n’avait à accomplir aucune formalité de ce genre, mais il lui restait à faire quelques emplettes utiles. Il courut chez un marchand d’habits de la rue de la Pépinière, prit sans regarder deux ou trois costumes et paya le marchand, qui contint une forte envie de faire arrêter cet acheteur extraordinaire. Mais Remi poussa un cri de détresse :

— Des souliers ! s’écria-t-il, des souliers !

Le marchand, bel israélite à tête de bouc avec une bouche avenante et des yeux impitoyables, répondit froidement qu’ « il ne tenait pas l’article chaussures ».

— Les vôtres ! donnez-moi les vôtres ! s’écria Remi désespéré.

Mais l’israélite, de plus en plus inquiet, fit une mine si sombre que Remi s’échappa en pantoufles avec ses habits, qu’il revêtit en chemin dans le fourmillement de la rue brillante. Il décrocha dans