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N’est-ce pas, Mercier ? Vous nous ferez les beaux-arts, vous, Labanne. Monsieur Sainte-Lucie, j’espère que vous nous donnerez aussi quelque chose. Nous comptons sur vous pour la question coloniale.

Sainte-Lucie, qui avait vu tant de choses, ne s’étonnait pas. Il buvait, il avait chaud, il était heureux.

— Je suis désolé de ne pas pouvoir vous rendre le service que vous me demandez, répondit-il. Mais je viens de Nantes, où j’étais en pension, et je ne suis pas au courant de la question coloniale. D’ailleurs, je n’écris pas.

Dion fut stupéfait. Il ne comprenait pas qu’on pût ne pas écrire. Mais il songea que les créoles étaient des gens étranges.

— Pour moi, dit-il, je donnerai dans le premier numéro mon amour fauve. Vous connaissez mon amour fauve ?


Très vieux, ployé, flétri par d’anciennes détresses,
Je veux errer sans fin dans la nuit de tes tresses.


— C’est vous qui avez fait cela ? s’écria Sainte-Lucie avec un enthousiasme sincère. C’est très beau !

Et il vida sa chope. Il était ravi.