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SUZANNE


Le Louvre, vous le savez, est un musée où l’on conserve de belles choses et des choses anciennes :



on a raison, car la vieillesse et la beauté sont également vénérables. Or, parmi les antiquités les plus touchantes du musée du Louvre, il est un morceau de marbre usé et rompu en beaucoup d’endroits, mais sur lequel on distingue nettement encore deux jeunes filles qui tiennent à la main chacune une fleur. Ce sont deux belles personnes : elles étaient jeunes dans la jeunesse de la Grèce. C’était, dit-on, l’âge de la beauté parfaite. Le sculpteur qui nous laissa leur image les a représentées de profil, se présentant l’une à l’autre une de ces fleurs de lotus que l’on disait sacrées. On respirait dans leur calice bleu l’oubli des maux de la vie. Nos savants se sont beaucoup occupés de ces deux jeunes filles. Ils ont consulté à leur sujet beaucoup de gros livres, reliés les uns en parchemin, d’autres en veau, et