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un pénible spectacle, il prit soin de ne pas regarder du côté de Pauline. Le hasard voulut qu’en allant et venant, elle remarquât l’attitude de Riquet. Cette attitude était triste. Elle la trouva comique et se mit à rire. Et, en riant, elle l’appela : « Viens ! Riquet, viens ! » Mais il ne bougea pas de son coin et ne tourna pas la tête. Il n’avait pas en ce moment le cœur à caresser sa jeune maîtresse et, par un secret instinct, par une sorte de pressentiment, il craignait d’approcher de la malle béante. Elle l’appela plusieurs fois. Et, comme il ne répondait pas, elle l’alla prendre et le souleva dans ses bras. « Qu’on est donc malheureux ! lui dit-elle ; qu’on est donc à plaindre ! » Son ton était ironique. Riquet ne comprenait pas l’ironie. Il restait dans les bras de Pauline inerte et morne, et il affectait de ne rien voir et de ne rien entendre. « Riquet, regarde-moi ! » Elle fit trois fois cette objurgation et la fit trois fois en vain. Après