Page:Anatole France - Autels de la peur.djvu/63

Cette page a été validée par deux contributeurs.

céleste. Mais je ne peux pas me donner sans amour.

Marcel resta longtemps sans répondre. Enfin :

— Qu’importe votre amour ! dit-il ; le mien est sans bornes et mon bonheur est infini comme mon amour.

XI.

27 FLORÉAL AN II.


Fanny s’était coupé elle-même les cheveux avant de monter au tribunal. C’est en robe blanche et coiffée comme les victimes qu’elle parut devant ses juges. Marcel Germain comparaissait avec elle. Le greffier lut l’acte d’accusation que le substitut Lardillon avait rédigé dans son plus beau style. D’après cet acte, Fanny d’Avenay était une de ces Phrynés aristocratiques qui excitent les citoyens à la débauche, dans le but d’étouffer leur patriotisme. Marcel Germain, séduit par les artifices de cette Circé, avait conspiré avec elle la perte de la république par l’assassinat, la famine, la fabrication des faux assignats, la dépravation de l’esprit public et le soulèvement des prisons.

Après cette lecture, Fanny s’assit au fauteuil et répondit aux questions du président avec une bonne humeur charmante.

Germain fut ensuite interrogé.

Épicharis était dans la salle. Accoudée à la cloison qui fermait l’espace réservé au public, elle jetait à l’accusé des regards romanesques.

Comme il répondait avec éloquence, son interrogatoire fut vite terminé. Ni lui ni Fanny n’avaient de défenseurs, le tribunal