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      Et trop tôt aussi nous délaisse,
   Un certain soir, un certain capucin
   Fut averti qu’une âme pénitente
Dans l'église attendait ce sacrement divin
Qui peut, nous soulageant du poids qui nous tourmente,
   Du paradis nous rouvrir le chemin,
Invention céleste et vraiment consolante !
Je peux voler, tuer, violer mon prochain ;
Tout droit au ciel j’irai sans épouvante.
      Pourvu qu’un jour je me repente
Et qu’un moine français me bénisse en latin.
Le père Ambroise, donc, à tâtons dans l’église
Descend et s’établit au confessionnal.
— Quel motif vous conduit à ce saint tribunal ?
Eh ! qui que vous soyez, dit-il, avec franchise
Contez-moi vos péchés : surtout point de secret.
Car Dieu ne permet pas ici que l’on déguise
Ni le bien qu’on a pris, ni le mal qu’on a fait.
— Mon père, lui répond une voix jeune et tendre.
Dont le doux tremblement annonçait l’embarras.
J’ai commis un péché si grand, si grand, qu’hélas !
De trouble et de remords je ne me puis défendre ;
Je ne sais trop comment vous en faire l’aveu.
— Mon enfant, dans votre âme il faut me faire lire.
— Oui, mais, mon père, si j’ose ainsi vous le dire,
L’aveu coûte beaucoup et le péché si peu !
Un jeune homme charmant... ah ! par pitié, mon père,
Devinez mon forfait, ménagez ma pudeur.
Il était si pressant !... comment pouvais-je faire ?
Peignez-vous Adonis, et jugez mon erreur.
— Ah ! ciel ! qu’avez-vous fait ? lui dit d’un ton sévère
Le moine courroucé. Pensez-vous au malheur
Qui peut suivre l’instant d’un coupable délire ?
Si vous n’épousez pas l’insolent suborneur