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statue qui est au Vatican, tenant un gouvernail d’une main et portant de l’autre une corne d’abondance remplie de fruits.

Cette Fortune créatrice et féconde était une bien grande déesse, car elle était la mère de Jupiter et de Junon, comme la grande mère de l’Ida.

On la figurait tenant l’un et l’autre dans son giron, tandis que le Jupiter enfant se tournait vers le sein maternel (mammam appetens). La Fortune nourrice, avec son divin fils, était singulièrement un objet de dévotion pour les mères[1]. Elle devait, en effet, exciter dans leurs cœurs un peu de cette dévotion tendre que la vue assez semblable de la Vierge et du petit Jésus y fait naître aujourd’hui.

Telle était dans l’origine la Fortune de Præneste, ville qui fut pélasgique, et dont les sorts devinrent si célébres. Ces sorts étaient tirés au moyen de bâtons de chêne par la main d’un enfant[2] comme les numéros de la loterie, après avoir été bénis par un prélat, sont tirés aujourd’hui sur le balcon du palais Madama.

  1. … Jovis pueri qui lactens cum Junone in Fortunæ gremio sedens, mammam appetens, castissime colitur a matribus. (Cic., de Div., II, 41.)
  2. On tirait aussi les sorts à Padoue (Suét., Tib., 14), près de l’embouchure du Pô, où avaient débarqué les Pélasges ; dans la pélasgique Agylla et à Falère (Tit. Liv., XXII, 1, 11), lieu tout rempli de souvenirs du culte pélasgique. Les sorts de Præneste étaient très anciens, et Præneste avait porté un nom grec. (Str., V, 3, 11.)