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remplit le Forum. Le Comitium et le Forum, les sénateurs et les plébéiens sont en présence. C’étaient, dit Tite Live[1], deux armées, dont chacune avait les yeux fixés sur son général ; deux armées, en effet, qui avaient été deux peuples.

Manlius répond avec audace au dictateur, et le dictateur ordonne qu’il soit conduit en prison. Il eut peu de chemin à faire pour s’y rendre, le Comitium touchait presque à la prison Mamertine. Manlius put y être entraîné sans avoir à traverser le Forum et avant que la foule qui le remplissait eût le temps de venir à son secours [2]. Seulement il leva les yeux vers le temple du Capitole, au pied duquel on l’arrêtait, et s’écria : « Jupiter, Minerve, Junon, vous que j’ai délivrés et sauvés, m’abandonnerez-vous à mes ennemis ! »

Un grand nombre de plébéiens en habit de deuil vinrent à la porte de la prison[3] où Manlius était plongé dans les ténèbres, attendant le bourreau[4], et pendant ce temps le temple sacré qu’il avait défendu étincelait au soleil au-dessus de sa tête.

Le peuple voulait briser les portes du cachot de

  1. Tit. Liv., VI, 15.
  2. Cette circonstance topographique rend raison de ce qui est difficile à comprendre dans le récit de Tite Live : que la multitude qui avait accompagné Manlius ne lui ait pas donné signe de sympathie au moment de son arrestation.
  3. C’est, je crois, le sens : Obversatamque vestibulo carceris mæstam turbam (Tit. Liv., VI, 13.)
  4. Tit. Liv., VI. 17.