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à la résistance. Mais Appius était redouté, et quand les licteurs arrivèrent, le silence régna dans cette foule, un silence de colère contenue et frémissante. Virginius était là dès le matin, conduisant sa fille en habit de deuil, accompagnée de quelques matrones et de nombreux amis. Appius monte à son tribunal, donne la parole à Claudius, puis prononce sur l’état de Virginie et la déclare esclave.

L’étonnement de cette atrocité tient d’abord toutes les bouches muettes. Claudius veut profiter de ce moment de stupeur ; il s’avance pour saisir Virginie au milieu du groupe de femmes qui l’entourent ; elles le repoussent. Virginius voit que le peuple de Rome, où, pendant une double guerre, il ne pouvait se trouver à peu près que des vieillards, va laisser le crime s’accomplir. « Je ne sais si ceux-ci, dit-il avec le mépris d’un soldat pour des bourgeois timides, le souffriront. » Et il ajoute, menaçant Appius de la colère de l’armée. « Mais ceux qui ont des armes ne le souffriront pas. »

L’armée n’était pas là ; il n’y avait là qu’une foule étonnée, irritée sans doute, mais désarmée, incertaine, qui n’était pas prête pour l’insurrection, à laquelle l’autorité du décemvir, l’audace des nombreux clients armés dont Appius avait eu soin d’entourer le Forum, imposaient encore. En effet, quand celui-ci donna l’ordre au licteur de faire exécuter le jugement et de remettre l’esclave aux