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Appius, cachant sous l’air impassible du juge la passion qui le tourmente, discute la question de droit, comme s’il s’agissait d’une cause ordinaire et qui lui fût parfaitement indifférente.

Quand les formes de la justice sont employées à masquer l’iniquité, elles la font paraître encore plus odieuse. Appius rend son jugement. Dans le considérant qui le précède (decreto præfatus), il déclare qu’il va appliquer la loi même qu’invoquent les défenseurs ; que la justice, pour venir en aide à la liberté, ne doit faire aucune acception des personnes.

Après avoir posé ces beaux principes, passant à la question de droit, il établit que si la fille est dans la main de son père, nul ne peut prétendre sa possession avant le jugement ; qu’il faut donc faire venir le père de famille ; qu’en attendant le réclamant ne peut perdre son droit, mais doit garder la jeune fille jusqu’à ce qu’il soit statué sur le fait de la paternité.

En entendant cet arrêt, la multitude frémit et se tait ; mais arrivent l’oncle de Virginie, Numitorius, et Icilius, son fiancé. Ils fendent la foule. Le licteur, par ordre d’Appius, déclare que le jugement est rendu, et repousse Icilius, qui reste là où il était, et élève une voix courageuse et indignée. La multitude s’émeut. Les licteurs entourent Icilius. Appius conserve les apparences de la modération et de la fermeté. Il ne fait point arrêter Icilius, mais déclare