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mort. En entendant ce récit, dont plus tard les patriciens prétendirent prouver la fausseté, la fureur des plébéiens fut extrême, et il s’en fallut de peu qu’on ne tuât Kæso sur la place. Le tribun Virginius ordonne de l’arrêter, les patriciens résistent par la force. On en appelle aux autres tribuns, le sénat, délibère, et pendant ce temps Kæso est gardé à vue, puis obligé de donner pour caution 30,000 livres ; on le relâche alors, et il peut quitter le Forum. La nuit venue il sort de Rome.

Son père fut obligé de vendre ses biens pour payer les trente mille livres[1], caution de son fils, et voilà comment Cincinnatus, qu’on représente comme le soldat laboureur, et qui, deux fois consul, était un des plus grands patriciens de Rome, fut réduit à aller cultiver au delà du Tibre un pauvre champ où nous le retrouverons.

  1. Avec une fortune de 30,000 livres, Cincinnatus n’aurait pas voté dans la première classe, mais dans la troisième, ce qui serait invraisemblable. Cette invraisemblance disparaît en admettant avec M. Böckh que les chiffres du cens de Servius donnés par les historiens doivent être réduits au cinquième. Alors c’est 20,000 livres qui formaient le minimum du cens de la première classe ; Cincinnatus pouvait donc en faire partie. Il faut pour cela que Tite Live n’ait pas évalué la richesse de Cincinnatus d’après la valeur postérieurement diminuée du cuivre, comme il le fait pour les sommes qui figurent dans le cens de Servius ; ce qui est fort naturel, car par cette évaluation il voulait donner une idée de ce qu’était réellement la richesse des différentes classes, et n’avait pas la même raison de préciser l’avoir de Cincinnatus ; il l’a donné tel qu’il l’avait trouvé probable-