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avait fourni à Rome son aristocratie. On conçoit que dans leur voisinage eût été à l’origine le rendez-vous des boni homines, ce qui avait, comme les honnêtes gens, le double sens de gens honnêtes et de gens comme il faut.

Un canal ou ruisseau traversait le Forum dans le sens de sa longueur, car il devait être un des affluents de la Cloaca Maxima ; il devait être aussi en rapport avec le lac de Curtius, avant lequel il est immédiatement nommé. Au bord de ce canal se rassemblaient particulièrement les oisifs, les flâneurs ; ils en avaient pris le nom. On les appellait les hommes du canal, canalicolæ[1], comme on dirait à Paris les habitués de la petite Provence. Ceux-là étaient, selon Plaute, pleins de prétentions, confiants, bavards, malveillants, disant à propos de rien impudemment du mal d’autrui, quand ils auraient eu assez à en dire d’eux-mêmes. Il paraît que, comme les habitués de la petite Provence, ces malveillants faisaient de la politique[2] au bord de leur

  1. Gell. Noct. att., IV, 20.
  2. C’est ce qui résulte d’un passage de Tertullien où, disant qu’il n’a pas l’ambition de jouer un rôle, qu’il ne court point après les places, il ajoute : Canales non odoro ; je ne vais point flairer les canaux ; comme nous dirions je ne vais point prendre vent auprès des canaux. Ceci, en ce qui concerne la topographie du Forum, montre qu’au temps de Tertullien le Forum était traversé par plusieurs de ces canaux, et à cause du double sens du mot odoro, semble indiquer que les canaux, probablement mal entretenus au troisième siècle, ne sentaient pas bon.