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l’institution de Servius qu’une institution militaire. Je ne doute pas que l’intention de Mastarna, chef guerrier, n’ait été d’organiser une armée, mais je crois qu’il a voulu aussi organiser un peuple.

Cette organisation ne fut pas démocratique, si l’on entend par démocratie la puissance du nombre. Cicéron, qui apparemment n’était pas pour le suffrage universel, loue Servius d’avoir empéché que les plus nombreux fussent les plus influents, ne plurimum valeat plurimi[1] ; Denys d’Halicarnasse prétend que ceux qu’il avait relégués dans la sixième classe, qui n’avaient qu’une voix, contents de participer d’une manière illusoire au vote général, ne s’aperçurent pas qu’en fait ils n’avaient sur ce vote aucune action[2] ; ce n’était cependant pas bien difficile à, comprendre.

Mais cette constitution était encore moins aristocratique, si par aristocratie on entend le privilège du sang. Elle était réellement populaire, tenant compte des situations véritables, proportionnant l’importance relative des citoyens à la propriété et attachant les devoirs militaires aux devoirs politiques, de manière à avoir une population armée et une armée d’hommes libres.

Roi étranger, Mastarna voulut unir sous son pouvoir et enfermer dans le cadre d’une même organisation l’aristocratie sabine, son ennemie et son danger, la plebs latine, son alliée naturelle et sa force, ainsi

  1. Cic., De Rep., II, 22.
  2. Den. d’Hal., IV,21.