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porté, comme un reflet de la teinte ancienne de ses eaux.

Comment rendre raison de ce changement ?

Je pense que le Tibre fut dit d’abord blanchâtre (Albula) parce que lui et surtout l’Anio, qui se jette dans son sein, recevaient plus de sources sulfureuses que maintenant, car le nombre en devait être plus considérable à une époque moins éloignée de l’âge des volcans. Les anciens parlent des eaux sulfureuses de l’Anio[1].

Il faut donc se figurer le Tibre roulant vers la mer des eaux blanchâtres : c’est tracer un premier trait de ce tableau de l’état primordial des lieux dont j’écris l’histoire.

À cela prés, le Tibre était tel que nous le voyons ; sa courbe suit encore le contour de l’espace où fut le Champ de Mars et où est la partie la plus habitée de la ville actuelle[2].

Le Tibre était dés lors, comme il est aujourd’hui, rapide et tourbillonnant[3] ; il ronge toujours ses bords, ce qui lui avait fait donner anciennement le nom de Dévorant[4]. Les livres des augures l’appelaient pour cette raison la Scie et, à cause de ses sinuosités, la Couleu-

  1. Sulphureis gelidus quà serpit leniter undis. Sil. It., Punic., xii, 539.
  2. Quem Tiberis curvis in latus urget aquis.

    (Ov., Fast., iii, 520.)
  3. Den. d’Halic., ix, 68. Virg., Æn., vii, 51.
  4. Rumon quasi ripas ruminans et exedens. Serv., viii, 63.