sitôt après votre retour ? je ne le pense pas. Ah !
Raymond, ma situation est cruelle. Forcée d’embrasser
une profession dont je me sens peu propre
à remplir les devoirs, pénétrée de la sainteté de
ces devoirs, et séduite, hélas ! par l’homme que
j’aimais le plus, je me vois réduite à opter entre
la mort et le parjure. Ma faiblesse, l’affection maternelle,
ne me permettent pas d’hésiter. La mort
de mon pauvre père, arrivée depuis notre séparation,
écarte un des plus grands obstacles à notre
union. Mon père repose dans le tombeau, et je n’ai
plus à redouter sa colère. Mais la colère de Dieu,
Raymond, qui pourra m’y soustraire ? Qui me protégera
contre le cri de ma propre conscience ? Je
n’ose m’appesantir sur ces réflexions ; elles me
rendraient folle. Ma résolution est prise ; obtenez
la résiliation de mes vœux ; je suis prête à vous
suivre ; écrivez-moi, ô mon époux ! dites-moi que
l’absence n’a point diminué votre amour ; dites-moi
que vous allez sauver de la mort votre innocent
enfant et sa malheureuse mère. Je suis en
proie à toutes les angoisses de la terreur. Il me
semble que tous les yeux qui se fixent sur moi
lisent sur mon visage mon secret et ma honte.
Vous êtes la cause, Raymond, de toutes ces souf-
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