pris pour plaire la moitié autant de peine… mais
ce n’est pas là ce dont il s’agit. Je disais donc,
monsieur, qu’un jeune seigneur devint amoureux
d’elle et l’épousa à l’insu de son père. Leur union
resta secrète pendant plus de trois ans ; mais enfin
le vieux marquis, fort mécontent en apprenant
cette nouvelle, prit aussitôt la poste pour Cordoue,
résolu de faire arrêter Elvire et de l’envoyer si
loin qu’on n’en entendît jamais parler. Quel tapage
il fit, grand Dieu ! lorsqu’en arrivant il
trouva qu’elle s’était échappée, qu’elle était allée
rejoindre son mari et qu’ils venaient de s’embarquer
l’un et l’autre pour les Indes occidentales. Il
jura, tempêta contre nous tous, comme s’il eût été
possédé du malin esprit ; il fit jeter mon père dans
une prison, mon père qui, j’ose le dire, était bien
le plus honnête cordonnier qui fût dans Cordoue ;
et quand il nous quitta, il eut la cruauté de nous
enlever le petit garçon de ma sœur, un enfant de
deux ans que, dans la promptitude de sa fuite, elle
avait été forcée de nous laisser. J’ai tout lieu de
présumer qu’il en a très-mal agi avec le pauvre
enfant, car nous avons reçu peu de mois après la
nouvelle de sa mort.
— C’était, madame, un méchant vieillard que ce marquis là, dit don Christoval.