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favorable, le bâtiment fut assailli par la tempête. Le navire était mal chargé, la cargaison extrêmement lourde ; et le roulis du vaisseau devint effrayant. Le ravage fut tel que le capitaine se décida enfin à retourner à Liverpool. Mais l’Annie Jane ne put atteindre le port. Poussé par la tempête, le bâtiment vint se briser sur les côtes d’une des Hébrides et deux cents personnes seulement échappèrent à la mort



LETTRE DE MONSIEUR JEAN CORNU.


…À minuit, on entendit de nouveau sur le pont la voix du capitaine et le bruit des matelots. Notre frère Vernier comprit aussitôt que le danger était loin d’être passé. À peine nous eût-il fait lever, que nous ressentîmes des secousses plus fortes qu’auparavant. Notre vaisseau était encore arrêté et échoué sur des écueils, au fond d’une petite baie en face de l’île de Watersay-Barra. Chacun attendait dans le silence le sort que le Tout-Puissant lui réservait. J’étais continuellement en prière. Je montai sur le pont : la mer couvrait le bâtiment par intervalle, il fallait se cramponner fortement pour ne pas être entraîné. Des matelots qui étaient à mes côtés, criaient de désespoir. Je leur dis de se confier en Dieu. Nous étions à cent pas de la terre, et tel était notre malheur que pas un moyen de sauvetage ne put être employé. Les chaloupes restèrent immobiles, jusqu’à ce que, détachées par les eaux, elles furent jetées en débris sur le rivage. Pas de feu et aucun moyen de nous faire remarquer. Ne pouvant plus y tenir, je descendis dans les cabines. Aussitôt des craquements se firent entendre et des cris de détresse nous arrivèrent de l’entrepont. Plusieurs passagers se réfugièrent, dans nos cabines. Ils étaient dans le plus triste état. Mes amis se réfugièrent