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qui s’abattaient constamment sur eux. Les naufragés remerciaient Dieu cependant de les avoir épargnés.

Le temps était froid et humide. Presque gelé et mouillé jusqu’aux os, affaibli par la souffrance, je cherchai à me placer au milieu du groupe, mais ne pus y parvenir. Je cherchai aussi monsieur Vernier et mes autres compagnons de voyage, mais sans succès. Je les crus tous morts. Malgré les morsures du froid, j’étais encore moins à plaindre que beaucoup d’autres, ayant eu le soin de me vêtir chaudement. Quelques jeunes femmes, à demi-nues tremblaient à mes côtés. Je pris mon paletot et leur en fis une espèce d’abri afin de les protéger, sinon contre le froid, du moins contre la fureur des flots. Le froid devenait si intense que j’en vis plusieurs tomber dans un fatal engourdissement, se coucher sur le pont et bientôt mourir à nos pieds. Pendant cette nuit affreuse, sept de nos compagnons périrent ainsi. Nos cœurs se brisaient : mais que pouvions-nous faire pour eux ? Nous avions beau les frictionner vigoureusement, rien n’y faisait pour les faire sortir de leur torpeur, sinistre avant-coureur de la mort. De temps à autre, nous jetions de grands cris dans l’espoir de nous faire entendre des habitants de l’île. Pour toute réponse, nous n’en-