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serein, et sa figure souriante. Quand il eut fini de prier, il se sentit heureux d’aller rejoindre Celui qui était mort pour lui, et au service duquel il avait consacré sa vie.

Des cris terribles retentirent alors de tous côtés. Nous vîmes se jeter dans le salon une troupe de gens, criant pleurant et se lamentant. C’étaient les passagers d’entrepont qui voyant que tout était fini pour eux ici-bas, avaient enfoncé la porte de communication avec les cabines, et venaient auprès de nous implorer du secours. Pauvres gens ! ils étaient tellement affolés par l’approche de la mort, qu’ils ne savaient que faire. Les femmes, les jeunes filles à demi-vêtues, les yeux hagards, les cheveux épars, suppliaient les hommes de leur donner le secours que ceux-ci ne pouvaient leur accorder. Eux-mêmes dominés par la frayeur, unissaient leurs cris à ceux des femmes dont ils imitaient les transports frénétiques.

Pendant que nous étions retournés à la cabine de monsieur Rose, monsieur Cornu, qui avait très froid, s’était réfugié dans un lit. Nous prîmes chacun un siège, et en nous regardant les uns les autres, nous fondîmes en larmes, nous disant adieu pour toujours sur cette terre, et nous donnant rendez-vous dans la patrie céleste, aux pieds du trône de Jésus.