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MADAME INGRES.

phaël, Michel-Ange, Titien, Paul Véronèse, avec leurs maîtres à eux, et les élèves qu’ils ont produits.

Je ne tardai pas longtemps à passer à la nature. Dessiner d’après le modèle, et peindre ! voilà quelle était toute mon ambition. Mon premier désir fut satisfait. Mais que de difficultés nouvelles !

Ce que je voyais faire m’aidait, je dois le dire, beaucoup plus que les conseils du maître. J’avais des camarades bien plus avancés que moi : je les regardais travailler, je les questionnais. Les conseils de M. Ingres, ou plutôt ses paroles n’avaient trait qu’aux grands principes de l’art : la ligne et les masses, c’est-à-dire le mouvement du modèle saisi à l’instant en quelques traits, et l’absence de tout détail dans les parties de lumière et d’ombre, ou du moins des détails subordonnés à ces deux choses essentielles, la masse de lumière et la masse d’ombre.

Aussi nous recommandait-il à chaque instant de cligner les yeux en regardant la nature.

Quant à nos dessins, d’un coup d’ongle, car il ne prenait jamais notre crayon, il indiquait, en laissant une trace profonde, la ligne que nous avions mal copiée, et l’exactitude de cette correction faisait notre étonnement à tous.