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L’ATELIER D’INGRES.

clarté se fît. Par contre, ce qui me toucha à me faire battre le cœur, ce fut le dessin de Calamata. Je ne croyais pas que la main d’un homme pût atteindre une telle perfection, et j’étais en extase… quand la porte s’ouvrit.

Je vis venir à moi M. Ingres.

Dirai-je son costume, qui me frappa en dépit de mon émotion, et ajouta une note un peu gaie à cette scène si grave pour moi ? Il portait à peu près pour tout vêtement un petit carrick assez court, qu’il tenait soigneusement croisé sur son ventre déjà un peu arrondi. Ce carrick devait être celui dont M. Ingres est vêtu dans l’admirable portrait qu’il avait fait en 1808 d’après lui-même C’en était du moins la forme et la couleur.

M. Ingres s’avança vers moi d’un air interrogateur ; — je m’empressai de me nommer, et j’ajoutai que j’avais la prétention de faire de la peinture et d’être admis dans son atelier.

« Ah ! mon cher enfant, soyez le bien venu, » me répondit M. Ingres en me prenant les deux mains dans les siennes (je vis alors que la précaution qu’il avait de croiser son vêtement n’était pas tout à fait inutile). « Votre excellent père a été bien dévoué pour les artistes, pour moi en particulier, quand il était au ministère, et je serais heureux de lui prouver toute ma gratitude en vous donnant mes conseils ? et mes