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L’ATELIER D’INGRES.

écoutée bien attentivement, que tout le monde fredonne après la première audition, est bien faite pour un public dont le but, en allant au théâtre, est surtout de rendre des visites dans les loges, presque toutes louées à l’année par la haute société. Quand l’air de bravoure est annoncé par sa ritournelle, les promenades cessent, le calme se fait, on applaudit avec transport la prima donna di cartello, et l’on reprend, pendant le reste de l’opéra, la conversation et la petite promenade.

Je dois dire qu’à mon avis la musique de Bellini et de Donizetti ne demande pas une attention beaucoup plus soutenue. Je m’imagine difficilement Gluck devant un pareil auditoire.

Ce qui prouve du reste le peu d’intérêt que l’on prend à la pensée de l’ouvrage, et combien ce petit bourdonnement chantant suffit aux Italiens, c’est l’usage de donner un ballet entre le premier et le second acte de l’opéra. Mais ce qui est plus fort, et ce que j’ai vu très-souvent, c’est que, le premier acte n’étant que très-rarement entendu par le public des loges, qui arrive, comme à Paris, fort tard, quelquefois pour le ballet seulement, on commence par le second acte de l’opéra, le ballet ensuite, et l’on finit par le premier acte. Je n’ai pas été peu surpris la première fois que j’ai vu l’héroïne qui s’était