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L’ATELIER D’INGRES.

silence que le moment suprême expliquait suffisamment.

Il faut être peintre, avoir subi cette épreuve de l’Exposition, pour comprendre l’impression étrange que vous produit votre œuvre au milieu de toutes les toiles qui l’entourent.

C’est d’abord, comme dimensions, un changement incroyable ; ce qui, dans l’atelier, paraissait grand, ou du moins assez important, devient au Salon un point imperceptible qu’on a beaucoup de peine à découvrir. Quant au mérite de l’ouvrage, celui du moins qu’on avait cru y trouver chez soi, il a disparu complétement, et l’on n’a plus devant les yeux qu’une chose affreuse qu’on voudrait faire enlever à l’instant, si l’on en avait le droit. Tous les tableaux de vos confrères vous paraissent au contraire réussis de tous points, et l’on a un moment d’éblouissement et d’admiration.

Dans un récit que me fit un jour M. Ingres de son arrivée à Paris, l’année où il apporta pour l’exposition son Vœu de Louis XIII et un assez grand nombre de tableaux de chevalet, il exprima, à mon grand étonnement, la sensation dont je viens de parler.

« Vous savez, me disait-il, que jusqu’à cette époque, j’avais rencontré peu de bienveillance de la part du public et des critiques ; chaque fois