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l’image d’un serpent, d’un dragon, d’une bête monstrueuse ? N’est-ce pas ainsi qu’a toujours été peint le démon ? Un prisonnier agenouillè aux pieds du saint, dans l’attitude de la prière ou de la reconnaissance, suppliant le pontife de briser ses fers, ou lui rendant grâces de les avoir brisés, était l’image de la Neustrie gouvernée naguère par le pieux évêque, délivrée par lui de l’idolâtrie et de l’erreur. Dans les tems où ces emblèmes furent imaginés, sans doute on ne se méprenait pas sur leur véritable sens. Mais dans la suite, le peuple, toujours ignorant et grossier, ne songea guères à percer le voile de ces allégories. Toutefois, l’anéantissement du paganisme dans la Neustrie, par saint Romain son dernier apôtre, étant un fait trop notoire pour qu’on pût l’oublier si vite, quelque tems on mêla ensemble le souvenir de ce bienfait et la foi au miracle de la gargouille. Dans un vieux mémoire manuscrit, le chapitre, représentant cette multitude empressée qui assistait à la cérémonie de la fierte, fait dire, par les pères à leurs enfans, en leur montrant la gargouille : « Voicy la commémoration du grand miracle que l’un de nos premiers evesques feist quant il tyra noz grandz peres hors du paganisme ; car nous estions en la puissance et entre les mains de ce grand dragon invisible qui est le diable, et, autour de ceste ville, le peuple fust délivré de ce dragon visible ; et furent noz pères