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Certes, c’était encore, non plus seulement pour la Normandie, mais pour la France tout entière, le cas d’un deuil universel et douloureux. Toutefois, cette année-là, le chapitre demanda et obtint, comme à l’ordinaire, la délivrance d’un meurtrier. La fierte fut levée par Pierre-Nicolas Courtil, barbier à Rouen, coupable d’homicide.

1526.

L’année suivante, la fierte fut levée par un des hommes les plus indignes qu’ait jamais élus le chapitre. Il n’était, toutefois, âgé que de vingt-quatre ans ; mais, si sa jeunesse put paraître un titre à l’indulgence, ne dut-elle pas aussi effrayer sur la perversité d’un homme qui, presque adolescent encore, était déjà chargé de crimes de toute nature, dans lesquels l’audace le disputait à la méchanceté. Il se nommait Gilles Baignart, sieur de Juèz, et était du diocèse de Lisieux. « Depuys huyt ans ou envyron, il fréquentoit avec les adventuriers, tant au pays de Picardie que par de-là les mons, et aillieurs, et prenoit la souldaye du roy, comme les autres adventuriers »[1]. Or on sait ce que c’était que les aventuriers, milice indisciplinée qui, après avoir dévasté le pays ennemi, de retour en France, y continuait ses excès et ses brigandages. C’étaient, dit une ordonnance de 1523, « gens vagabondz,

  1. C’est donc à tort que les nouveaux annotateurs de Rabelais ont dit que les aventuriers faisoient la guerre sans solde. (Rabelais, tom. II, pag. 37 de l’édition de MM. Éloi Johanneau et Esmangart, 1828.)