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LES AVENTURIERS DE LA MER


leur sort avec une résignation silencieuse ou une insensibilité stupide ; d’autres se livraient à toute la frénésie du désespoir. Plusieurs imploraient à genoux, avec cris et larmes, la miséricorde divine, tandis que quelques-uns des soldats et des matelots les plus vieux et les plus fermes de cœur allaient d’un air sombre se placer au-dessus du magasin à poudre, afin que l’explosion, qu’on attendait d’un instant à l’autre, terminât plus promptement leurs souffrances.

« Au milieu d’un groupe de femmes réfugiées dans les chambres de la dunette, deux jeunes filles, dit le capitaine Mac Grégor, se faisaient remarquer par leur courage et leur foi. Lorsqu’on vint annoncer l’approche d’une mort inévitable, elles se jetèrent à genoux, et offrirent à leurs compagnes de leur lire des passages de la Bible. »

Parmi les petits enfants, ceux qui ignoraient le danger continuaient de jouer dans leurs lits, tandis que les autres au contraire, comprenant toute l’horreur de la situation, s’attachaient à leurs mères, et de grosses larmes coulaient de leurs yeux.

— Une voile sous le vent ! cria tout à coup un matelot monté dans le petit mât de hune.

Une lueur d’espoir vint relever les courages abattus.

On hissa le pavillon de détresse, et on tira le canon de minute en minute ; mais la violence du vent ne permettait pas aux canons de se faire entendre.

Rien n’indiquant aux naufragés que leurs signaux fussent aperçus, ils retombèrent dans de mortelles angoisses.

Cependant la fumée qui montait au-dessus du navire incendié appela l’attention du brick signalé qui, forçant de voiles, s’approcha du Kent, se tenant néanmoins à une prudente distance, dans l’éventualité d’une explosion du vaisseau.

Le brick qui était venu si généreusement au secours des naufragés était la Cambria, capitaine Cook, faisant voile pour la Vera-Cruz, et ayant à son bord une trentaine de mineurs de Cornouailles.

À bord du Kent on mit le grand canot à la mer. Les officiers maintenaient l’ordre, l’épée nue à la main, mais sans avoir à lutter contre l’indiscipline. On entassa dans le canot les femmes des officiers et aussi quelques femmes de soldats, puis les enfants furent placés sous les bancs, et on se dirigea vers le brick. La mer était très grosse. Le premier transbordement s’effectua heureusement.

Au retour, quand on chargea de nouveau le grand canot, la force du