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AMÉLIE

son amitié ; il n’en fallut pas davantage ; je lui fis une confidence dont j’eus bientôt lieu de me repentir.

Cruellement affectée de voir ses soupçons éclaircis, elle dissimula cependant assez bien ses véritables sentiments, pour ne pas trop le paraître ; ce ne fut que le lendemain, quand Lechesne revint, qu’elle ne put se contenir. Ils eurent une explication très vive, à laquelle je n’assistai point, parce que, dès que je vis que la conversation s’échauffait, j’eus l’attention de me retirer dans ma chambre, et de ne reparaître que quand il fut parti.

Victoire me répéta toute leur conversation, et me dit qu’il exigeait que je sortisse de la maison, ou qu’il n’y remettrait plus les pieds ; mais qu’elle lui avait répondu, sur ce dernier point, de manière à lui faire comprendre qu’elle préférait me conserver. Persuadée du contraire, je voulais absolument qu’elle consentît à ce que je m’éloignasse ; mais quelques raisons que je pusse lui donner, il me fut impossible de les lui faire entendre. Je pris toutefois mon parti, parce qu’il n’était pas naturel qu’elle se contraignît au point de paraître, vis-à-vis de moi, brouillée avec un homme qu’elle chérissait au delà de l’imagination. Cependant, à dire vrai, je me trouvais un peu embarrassée dans le choix des moyens que j’employerais pour la forcer de me laisser partir ; car, en entrant chez elle, je l’avais