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AMÉLIE

Georges, qui venait, m’aviez-vous dit, la vengeance à la main, vous demander compte des destins de son frère ? Où est-il, que je lui fasse passer l’envie d’aller désormais en bonne fortune ?

Cette menace fut accompagnée d’un geste qui me fit trembler pour les jours de Joseph, s’il était découvert ; car il sortit de sa poche une paire de pistolets dont il me parut disposé à faire usage. Je protestai de mon innocence, et l’assurai que j’étais seule ; que si je m’étais enfermée aux verrous, c’était dans la crainte que Joseph, profitant de l’absence de ma domestique, ne revînt à la charge, et que je croyais que c’était lui qui reparaissait, quand j’avais laissé si longtemps frapper à la porte ; qu’il pouvait, au surplus, visiter mon appartement, pour s’assurer de la vérité de ce que je lui disais.

Il se contentait de cette explication, et j’allais en être quitte pour la peur, quand ma maudite servante entra dans ma chambre à coucher ; elle soutint que j’en imposais par ma fermeté, et que ma défense était un tissu de mensonges ; qu’elle n’était sortie pour avertir M. Richeville que lorsque l’ami de Joseph m’avait laissée seule avec lui, et qu’à la manière dont mon lit et mes cheveux étaient dérangés, il était facile de voir que je n’avais pas été aussi sage que je le prétendais.

Je convins qu’effectivement ce jeune homme