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AMÉLIE

mon appartement. Nous sautons en bas du lit, et pendant que Joseph se rajuste de son mieux, je m’avance du côté de la première porte, et je prête l’oreille pour connaître, s’il est possible, la cause de cet esclandre. Qu’entends-je ? oh ciel ! malheureuse Amélie ! Richeville, furieux de ne pouvoir entrer, et ma domestique essayant en vain d’ouvrir la porte, dont le verrou nous répondait.

— Voyez, dis-je à l’imprudent Joseph, à quoi votre aveugle passion vient de m’exposer ? que vais-je devenir ? et vous-même, comment allez-vous vous tirer de ce mauvais pas ?

J’ignorais l’effet que produirait cette aventure sur l’esprit de mon amant ; car je ne voyais nul moyen de lui prouver que je lui fusse restée fidèle. Joseph tremblait de toutes ses forces, et me suppliait de le cacher pour le dérober aux vengeances d’un homme qui, sans doute, ne l’épargnerait pas.

Peu rassurée moi-même, mais obligée de prendre un parti quelconque, je fis entrer mon trembleur dans une armoire pratiquée dans le mur, et j’en mis la clé dans ma poche ; mais trop effrayée sans doute pour prendre les précautions qui étaient indispensables, j’oubliai de réparer le désordre du lit et de ma toilette, témoins muets, mais suffisants, pour attester ma faute. Je fus donc ouvrir les verrous, et Richeville et sa suivante entrèrent, bien étonnés de ne trouver que moi dans l’appartement.