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AMÉLIE

Joseph de nous suivre, et lui laisser ignorer, s’il était possible, le lieu que j’habitais. Je ne sais s’il courut aussi vite que la voiture, ou s’il mit sur-le-champ du monde à ma poursuite ; mais ce qu’il y a de certain, c’est qu’il sut ma demeure.

J’étais à peine rentrée, qu’un tremblement soudain s’empara de tous mes membres ; je fus obligée de me jeter sur un canapé où je restai évanouie. Cet état de faiblesse fut long ; cependant je revins à moi, mais je conservai, pendant quelques heures, un étouffement qui me fit beaucoup souffrir. Dès que Richeville me vit mieux, il voulut savoir la cause de cet accident ; je la lui appris, en lui observant que je ne l’en avais point instruit dans le bois, pour ne pas lui donner d’inquiétude à mon sujet. Nous reconnûmes alors que j’avais commis une grande imprudence en me montrant si souvent en public, et il fut convenu que je ne paraîtrais plus, qu’il n’y eût certitude que je pourrais le faire sans danger.

Je me couchai de bonne heure ; mais il me fut impossible de dormir un seul instant, tant je fus agitée. Je craignais que Joseph ne connût la maison que j’habitais, et qu’il me fût impossible de lui échapper. Hélas ! j’avais bien raison ; car, dès le lendemain, on remit au portier une lettre à mon adresse. Je ne pus pas douter qu’elle fût de lui ; je l’ouvris en tremblant. Elle était ainsi conçue :