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AMÉLIE

velles. Elle prit alors un ton douloureux pour m’annoncer que je ne devais plus m’attendre à te revoir. Je voulus être informé des détails du nouvel accident qui portait le dernier coup à mon amour constant et malheureux ; elle se recueillit un peu pour préparer un mensonge, et pendant que je pleurais ta perte, elle poursuivit ainsi :

« Lorsque Amélie et moi nous fûmes persuadées que vous aviez reçu un coup mortel, nous nous hâtâmes de nous éloigner, car nous pouvions craindre d’être reprises par vos assassins, Nous nous enfonçâmes dans le bois ; mais la peur avait tellement troublé nos esprits, qu’au lieu de nous éloigner directement du château, après avoir couru, traversé différents sentiers, dont l’obscurité nous empêchait de découvrir les issues, nous revînmes insensiblement nous jeter dans les mains des scélérats qui faisaient d’exactes recherches pour nous découvrir. Amélie, qui marchait devant moi à une distance assez grande, fut arrêtée et ses cris m’avertirent du danger que je courais moi-même, si je ne m’échappais promptement. Incapable de lui donner le moindre secours, je rebroussai chemin avec une si grande légèreté, que je n’entendis bientôt plus ni les coups que lui portaient ces monstres, ni les cris de la malheureuse victime qu’ils ont sans doute immolée à leur fureur et à leur vengeance. Pour moi, je ne m’arrêtai qu’à la pointe